Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Impertinence

Retour de l'anneau de Jeanne d'Arc en France : Impertinence y était

21 Mars 2016 , Rédigé par Clément Henri-Rousseau Publié dans #Culture

Retour de l'anneau de Jeanne d'Arc en France : Impertinence y était

Le 20 mars 2016, une cérémonie célébrant le retour en France de l’anneau de Jeanne d’Arc était organisée par le parc du Puy du Fou. Racheté en Angleterre par la Fondation Puy du Fou Espérance grâce à une multitude de donateurs, l’anneau était resté prés de six siècles en Angleterre. 

La cérémonie mêlant fanions médiévaux, poilus de la Grande Guerre, chants saint-cyriens, et discours de Malraux, dévoilait un but évident : rendre hommage à la France éternelle.

 

« C'est un petit bout de France qui revient, une parcelle de nos grandeurs déchues » clame Philippe de Villiers. Le ton est donné. Dans la cour historique du château du Puy du Fou, une haie d’honneur de puyfolais, ouverte par des ''poilus'' de la Grande Guerre en costumes d’époque, forme un cortège autour de l’anneau déposé précieusement sur un coussin de velours, lui-même placé dans un reliquaire en verre. Les bannières et oriflammes ornent le tout d’une allure légendaire, sur fond de musique sacrée et épique. La procession, mêlant spirituel et profane, est terminée par un régiment de saint-cyriens, venus volontairement pour l’occasion. Maitre Trémolet de Villiers, présent dans la tribune d’honneur, le dit bien, « Jeanne est un pont entre la terre et le ciel ». La quasi-mysticité de la cérémonie traduit cette alliance surnaturelle. 

De nombreuses familles sont présentes. Certaines sont venues de Nantes, d’autres ont même fait la route depuis Orléans. Des enfants courent, des scouts en uniforme et des puyfolais, reconnaissables à leur badge, sont légions. Cinq mille personnes sont présentes. 

 

Après les chaleureux remerciements aux donateurs (376.833 euros de dons !) et les différentes allocutions, résonne d’outre-tombe le discours d’André Malraux évoquant la « Jeanne sans sépulcre et sans portrait », suivi du chant par les Cyrards du poème de Péguy « Heureux ceux qui sont morts » chanté sur l’air de l’hymne composé pour l’arrivée triomphale de Jeanne d’Arc à Orléans en 1429. Dans ce syncrétisme johannesque mêlant fanions de la Chrétienté médiévale, poilus de la Grande Guerre, Saint-Cyriens à la plume de Casoar, et Malraux célébrant « la France avec son clocher tout bruissant des oiseaux du surnaturel », le but est évident : la cérémonie est un hymne à la France éternelle. « République, notre royaume de France » écrivait Charles Peguy, n’en déplaise à ceux qui pensent que la France est née en 1789, ou est morte en 1789. 

 

Impertinence a tenu à interroger les personnes présentes, venues parfois de loin. Albéric, étudiant en sciences politiques à l’Institut Catholique d’Etudes Supérieures (ICES) à la Roche-sur-Yon, estime que l’anneau est « un emblème national, considéré comme une relique. C’est important de venir en tant que français. C’est notre patrimoine ». Il concède que « même si c’est un truc catholique, il y a des gens de tous les milieux ». Pour Christian, 52 ans, « c’est important parce que ça donne du punch. Elle –Jeanne d’Arc, ndlr–a sauvé la France. Cela fait vibrer. Cela fait partie des traditions ». Quant à Leatitia, puyfolaise, elle dit « vénérer Ste jeanne d’arc en tant que catholique. On vient de prouver avec ce qui s’est passé avec les anglais (infra) que l’anneau est authentique. Je n’ai pas peur d’être caricaturé, c’est le combat de tous les jours, on doit se battre contre les préjugés ».

 

Retour de l'anneau de Jeanne d'Arc en France : Impertinence y était

« L’Histoire retiendra que l’anneau de Jeanne d’Arc est revenu en France pour toujours »

 

Le fameux historien Franck Ferrand est dans le carré d’honneur, aux côtés du fondateur du Puy du Fou Philippe de Villiers, son fils Nicolas directeur du site, et de l’avocat du parc maître Jacques Tremolet de Villiers. L’historien, pourtant très critique de la version historique de l’épopée de Jeanne, lance à la foule qu’il reconnait évidemment à Jeanne sa « puissance d'illumination, symbole d'une force de résistance, d'une énergie, d'un amour du pays ». Pourtant, la question de l’authenticité de l’anneau semble tarauder les journalistes sur places qui interrogent les personnes présentes. Nicolas de Villiers assure « nous avons les éléments qui nous permettent d'affirmer que c'est bien l'anneau de Jeanne d’Arc ». L’anneau a ainsi bien été authentifié comme datant du XVème siècle par le laboratoire Oxford X-ray Fluorescence Ltd. L’expert en orfèvrerie Louis-Guillaume Piéchaud affirme même qu’il « ne fait nul doute qu'il s'agit là d'un travail pouvant être daté du XVème siècle ». Mais la question demeure : l’anneau a-t-il été porté au doigt de la pucelle ? L’historien Franck Ferrand répond stoïquement que « personne ne vous dira que cet anneau est à 100% celui de Jeanne, mais je crois qu'on peut, en toute bonne foi, penser qu'il s'agit de l'anneau authentique ». Le directeur du Puy du Fou rétorque simplement : « L’Histoire retiendra que l’anneau de Jeanne d’Arc est revenu en France pour toujours ». 

 
 
 

« Messieurs les Anglais, si vous voulez voir l'anneau, welcome to the Puy du Fou ! »

 

Histoire. Le mot est sur toutes les bouches. Philippe de Villiers sent bien qu’il est en train de vivre un morceau d’Histoire de France. Et pas que d’Histoire de France d’ailleurs, dit-il : « Le gouvernement anglais a fait à notre avocat une demande inouïe: le retour de l'anneau à Londres. Une demande justifiée par le fait qu'il s'agit d'un objet à forte valeur symbolique nationale ». Le Conseil national des Arts (Art council), après quelques expertises, aurait conclu qu’il serait probable que l’anneau fasse partie des « objets de haute valeur symbolique du patrimoine national britannique». « Le gouvernement anglais pouvait préempter l'anneau au moment de la mise aux enchères et, aujourd'hui, il le regrette », tacle le fondateur du Parc, qui se « réjouit de cette demande qui vient authentifier l'anneau dans son historicité ». « L'anneau de Jeanne fait-il partie du patrimoine français ? » lance l’ancien homme politique à la foule, avant d’interpeller l’Angleterre : « Messieurs les Anglais, si vous voulez voir l'anneau, welcome to the Puy du Fou. Aux autres, je dis it’s too late ! ».

 

Nul doute que c’est une nouvelle page de notre roman national qui vient de s’ouvrir. Après l’épopée de la pucelle d’Orléans et sa condamnation par l’évêque Cauchon en 1431, après la révision du procès par le pape Calixte III en 1455 et la réhabilitation de Jeanne, après sa canonisation en 1920 et la même année l’instauration législative de la fête nationale de Jeanne d’Arc le deuxième dimanche de mai, l’anneau de la pucelle est revenu en France le 20 mars 2016, après six siècles d’exil. « Et il le restera » ajoute Philippe de Villiers.

 

 

 

 

 

 

Photos : Olivier Rochette

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article